La victoire imprévue

La victoire de la gauche aux dernières élections législatives a créé quelques surprises : le président de la République n’avait pas envisagé ce résultat lors de la dissolution, les sondages et les analystes financiers internationaux garantissant une substantielle avance à la coalition UDF-RPR (ce qui explique les curieuses oscillations de la Bourse entre les deux tours), et même dans nos propres rangs, de nombreux militants n’osaient y croire.

Nous pouvions craindre que le puissant rejet dont nous avons été victimes en 1993 n’ait pas été totalement dissipé. Cette période n’a probablement pas été oubliée, mais nous avons su convaincre nos concitoyens d’effectuer un choix raisonné sur les candidats de la gauche. Certains électeurs se préparaient sans doute à revenir vers nous en 1998, et ont dû le faire de façon anticipée.

La volonté de sanctionner un président et un gouvernement qui a oublié, sans autre forme de procès, les engagements de la campagne présidentielle, qui n’a obtenu aucun résultat sur l’emploi et qui a tenté de conserver le pouvoir par une ultime manœuvre politique a pesé. Mais, surtout, nos concitoyens ont estimé que la démarche du parti socialiste et de Lionel Jospin était digne de confiance.

Les Français ont sévèrement jugé l’absence de projet de la droite, mais ils ont également appris à être très critiques vis-à-vis des programmes. Ils ne veulent pas d’un gouvernement qui serait contraint de l’abandonner au bout de quelques mois. Ils ont comparé les mesures chocs des 40 premiers jours, proposées par Alain Juppé, et la volonté que nous avons eue de présenter un programme, pensé pour une législature de 5 ans, et suffisamment crédible pour être considéré avec sérieux.

Par sa campagne, Lionel Jospin a su respecter les français. Dans une période où les citoyens ont l’impression que le discours politique n’est qu’un jeu où l’on se partage le pouvoir avec cynisme, c’était la meilleure chose à faire pour remporter la victoire et redonner une meilleure santé à notre démocratie.